Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Scribouillages et pensées frénétiques
17 janvier 2023

La datation en préhistoire ou pourquoi je reste assez floue sur les datations dans mes articles archéologiques

Dans les articles précédents issus de mes fils twitter désormais disparus, j’ai donné des repères temporels très vagues et des dates pour ces repères temporels à la (très) grosse louche.

Personnellement, une date, ça ne me parle absolument pas. On me dit -1000 ou -10 000, je fais un “Aaaah” poli, tout ce que je retiens, c’est que -10 000 c’est beaucoup plus vieux que -1000 et puis voila. Replacer ces dates dans une grande période, c’est beaucoup plus parlant.

À la rigueur, donner des dates permet de rappeler, de temps en temps, que certaines réalisations et donc périodes peuvent être contemporaines les unes des autres :

  • Stonehenge a été construit par étapes au troisième milénaire avant notre ère : “Ooooh-oh !” poli.
    Stonehenge : Angleterre, gros dolmens en pierre, donc Préhistoire !
  • La pyramide de Kheops a été construite entre -2.600 et -2.500 BC : “Aaah ?” poli.
    Khéops : Egypte, hiéroglyphe, Histoire !
  • Les "dolmens" de Stonehenge, les grands sarsens qui forment le gros cercle et le fer-à-cheval et la pyramide de Khéops, ça a été construit grosso modo à la même époque. Et le petit cercle de pierres bleues, entre le cercle de sarsens et les trilithes qui font un fer à cheval, il a été érigé 300 ans après la pyramide de Khéops.
    Ca secoue hein ? 
    ...Et c’est on ne peut plus exact : quand, en Egypte, on est déjà dans l’Histoire, en Europe, où on n’écrit pas encore, c’est toujours la préhistoire, l’âge du cuivre puis l’age du bronze. Et la civilisation Egyptienne ancienne, c’est une civilisation de l’âge du cuivre puis de l’âge du bronze. Les pierres dressées qu’on voit actuellement à Stonehenge ont été érigées à peu près en même temps que la grande pyramide (pour les sarsens) et après la grande pyramide (le cercle de pierre bleue entre le cercle de sarsen et le fer-à-cheval).

J’ai donc donné des indications temporelles sous forme de période dans mes précédents articles, tout en restant très vague : j’ai parlé du Paléolithique (l’âge de la Pierre Ancienne) qui est une période qui s’étend de l’apparition des premiers hommes il y a 3 millions d’années (et plus récemment en Europe vers 1.76 millions d’années jusqu’à la fin de la dernière glaciation vers -10000, précisé succintement que les Neandertals avaient vécu au Paléolithique Moyen (donc de -350 000 à -40 000 +- 5000 suivant les sources) et que l’art préhistorique était l’oeuvre d’Homo sapiens qui arrive en Europe entre -39 000, et est daté du Paléolithique récent, soit entre l’arrivée de l’Homme moderne et la fin de la glaciation vers -10.000.

On pourrait encore affiner beaucoup plus ces périodes en donnant soit des dates absolues soit en replaçant ces dates dans une période, dont les noms proviennent soit des glaciations en cours ou des périodes interglaciaires soit de la technique de taille de pierre, mais il y a deux écueils :

Premièrement : c’est bien gentil de balancer des noms tels que micoquien, moustérien, aurignacien, magdalénien, maximum glaciaire de Würm IV, etc. mais si je ne fais pas une note de bas de page pour expliquer ce que c’est, d’où ça vient et ce que ça désigne, ça ne sert à rien sinon me la jouer Stroumph à Lunette en barbant les lecteurs non spécialistes.

Deuxièmement : ces dates ou ces périodisations, on les a obtenus comment exactement ? Est-ce que c’est fiable ? Est-ce que c’est à jour ? Cela entraine des vérifications sur les dates pour chaque date obtenue car
Cela, c’est à chaque fois une opération de recoupage des informations, surtout en matière d’art archéologique, et je m’en vais expliquer pourquoi ci-dessous :


Datation absolue vs Datation relative :

Différentes méthodes permettent d’estimer l’age réel d’un objet, avec plus ou moins de précision. On parle de datation absolue. Ces dates sont donné BP, c’est à dire Avant le Présent, qui est placé à 1950 de l’ère chrétienne (que personnellement j’arrondi mentalement à 2000 de notre ère, parce qu’on va pas chippoter pour 50 ans quand on parle de date à -17000 BC, +- 100 ans).
Ces méthodes de datation font appel à des analyses physiques ou chimiques et elles ont été mises au point bien après que l’on ne commence à récolter des cailloux antédiluviens et à exhumer des restes d’Homo stupidus – pardon, de Neandertal – au milieu du 19eme siècle.

Avant le développement de méthodes de datation absolues, on procédait par datation relative ; c’est-à-dire que si l’on ne peut pas estimer la date à laquelle une chose à été faite, on peut en revanche établir si elle a été réalisée avant ou après une autre chose. D’où le choix de fouilles stratigraphique qui prédomine fin 19eme et début 20eme : une coupe à travers le sol permet d’observer les différentes couches et les objets contenus dans ces couches. Pour l’art pariétal, c’est pareil : même en étant incapable d’obtenir une date pour la réalisation d’une peinture dans une grotte, on peut parfois établir quelles sont les œuvres réalisées avant d’autres lorsqu’on voit des peintures qui en recouvrent d’autres, que l’on voit que certaines œuvres sont recouvertes d’un voile de calcite beaucoup plus épais que d’autres, sur la même paroi.

Une fois qu’on a établi la stratigraphie d’un site, comment faire pour établir des correspondances entre les couches de ce site et celles d’un autre et donc établir quelles sont les couches contemporaines dans ces deux sites ? Non, on ne va pas faire une gigantesque tranchée d’un site à l’autre pour observer la stratigraphie tout au long de la coupe et vérifier si ces deux couches sont au même niveau ou à des niveaux différents ! On se base sur la présence de fossile directeur.
Un fossile directeur, ce n’est pas nécessairement un os fossile, c’est un objet, naturel ou manufacturé, qui va servir de marqueur temporel : autant dire qu’il faut le choisir judicieusement pour qu’il soit pertinent : il faut que ce soit à la fois quelque chose qui soit assez généralement utilisé pour être présent dans toutes les couches d’une même période, assez caractéristique pour être reconnu sans hésitation, qui présente un lien avec la période qu’on veut identifier et qui apparaisse (voir disparaisse) de façon indiscutable lorsque la période prend fin.

Edouard Lartet propose une chronologie basée sur la mégafaune :

  • Age du Grand Ours des Cavernes
  • Age du Mammouth et du Rhinocéros
  • Age du Renne
  • Age de l’Auroch

Ces périodes sont cependant trop vastes pour être réellement pertinentes, d’autant que la présence de la mégafaune dépend en grande partie du paysage, qui dépend du climat et pas tellement de la présence d’humains, ni du type d’humain.
Aussi, le fossile directeur proposé par Christian Jürgensen Thomsen va séduire d'avantage, être paufiné par Gabriel de Mortillet et est d'ailleurs toujours utilisé : il s'agit de l'outillage humain. D’abord de façon très généraliste (Age de la Pierre, du Bronze, du Fer) puis en affinant chaque catégorie en sous-catégories d'après l'outillage (soit une pièce remarquable soit un assemblage de pièces remarquables), sous-catégories qui tirent leur nom généralement d'un site éponyme, c'est à dire ceux où cet outillage a été observé et décrit la première foi. 

  • Paléolithique ("Pierre Ancienne" - outillage en pierre taillée – cultures de chasseurs)
    • Paléolithique archaïque : outillage sur gros éclat,
    • Paléolithique ancien : outillage sur biface (gros silex taillé sur ses deux faces)
      • Abbevillien / Chelléen (obsolète) & Acheuléen
    • Paléolithique moyen : outillage sur éclat de silex
      • Moustérien (typique, à denticulé, charentien, de tradition acheuléenne…)
      • Micoquien (Industrie particulière, surtout en Europe centrale)
    • Paléolithique récent : outillage sur lame de silex
      • Châtelperronien
      • Aurignacien
      • Gravettien
      • Solutréen / Épigravettien / Proto-magdalénien (ou Badegoulien)
      • Magdalénien
  • Mésolithique (la "Pierre du Milieu" parce qu’on a mis en évidence cette industrie après avoir nommé le paléolithique et le néolithique – outillage en pierre taillée de toute petite dimension – cultures de chasseurs mais dans un milieu boisé, après la fin de la dernière glaciation)
  • Néolithique (La "Pierre Nouvelle" - toujours de la pierre taillée mais à nouveau de très grande taille et qui subit ensuite un polissage plus développement de la céramique qui sert de fossile directeur pour déterminer les sous-périodes / cultures – en parlant de culture, ça y est, on passe à l’élevage et à l’agriculture)
  • Age du Cuivre (ou Chalcolithique : période de transition ou apparait la métallurgie : objets en or ou en alliage de cuivre)
  • Age du Bronze (on peut toujours avoir des outils en pierre taillée, mais la métallurgie se généralise, le bronze (alliage de cuivre et d’étain) se généralise
  • Age du Fer (on trouve toujours du bronze à l’âge du Fer et on pouvait aussi parfois retrouver du fer à l’Age du Bronze, mais maintenant la métallurgie du fer s’est généralisée, les objets de fer ne sont plus de rares objets de prestige en fer météoritique

Cette classification est utilisée pour les peuples sans écriture. Ceux qui utilisent l’écriture sont défini par le nom de leur état ou civilisation, indépendamment de leur niveau technique : la civilisation égyptienne est une culture du Chalcolithique puis du Bronze, Rome est une culture de l’âge du Fer, mais on ne les défini que très rarement ainsi. Les voisins très proches de ces civilisations, qui n’utilisent pas l’écriture mais qui sont connus par leurs relations avec des peuples avec écritures, sont parfois désignés par un nom donné par leurs voisins entrés dans l’Histoire et parfois par un nom plus générique : on parle d’Age du Fer, de culture de Hallstatt ou de La Tène pour l’Europe ou bien de Celtes (nom donné par les Grecs) et de Gaulois (nom donné par les Romains). On parlera de Protohistoire pour désigner ces peuples sédentarisés, utilisant la métallurgie et contemporain de peuples avec écriture avec lesquels ils sont parfois en contacts guerrier ou commerciaux.

Pour les peuples historiques, on abandonne la classification en Age et en culture données d’après des fossiles directeurs, mais on n’abandonne pas non plus l’usage du fossile directeur pour dater des chantiers archéologiques : les monnaies ou les amphores romaines, qui sont produites en grandes quantités, massivement diffusées, bien reconnaissables et changeant rapidement, constituent par exemple d’excellent "fossiles directeurs".

Dans cette successions d’Âges, il y a une notion sous-jacente de progrès technique : on passe d’un outillage grossièrement taillé à de belles pièces de grandes tailles, puis à des pièces plus petites et sur éclats, qui impliquent un savoir-faire et un soucis d’économie, puis à des pièces plus petits et sur lames permettant d’obtenir beaucoup plus d’outils à partir de la même quantité de silex, puis à de très petits outils, puis à des outils en pierre polie et de la céramique, qui va également servir de fossile directeur, puis aux métaux, dans une sorte de marche vers le progrès. Et à chaque homme fossile son type d’outil de pierre :

  • Homo habilis utilise des gros éclats grossièrement taillés,
  • Homo erectus des bifaces de belle taille,
  • Homo neanderthalensis un outillage sur éclat levallois ou des petits bifaces,
  • Homo sapiens de l’outillage sur lame de silex qu’il va perfectionner sans fin jusqu’à arriver à un outillage sur microlites : des fragments de quelques centimètres assemblés pour former lames de couteau ou pointe de flèche, avant de penser grand et de passer à la Pierre Polie…

Mais les choses ne sont évidemment pas aussi simples ! Il n’y a pas un seul et unique schéma évolutif allant de l’outillage le plus basique au plus perfectionné et économe en matière et les subdivisions proposées pour le Paléolithiques archaïque, ancien, moyen et récent sont autant des périodes que des cultures (au sens matériel du terme : on ne sait pas si "les Aurignaciens" avaient la même langue, partageaient la même conception du monde, s’ils partageaient suffisamment de points communs pour qu’on parle d’un peuple, cependant les objets fabriqués durant cette période par ces gens présentent beaucoup de points communs) c’est-à-dire qu’on peut avoir deux "périodes" contemporaines dans des régions différentes et que la succession de ces périodes n’est pas identiques partout, même en Europe. Mais comme l’esprit humain aime la simplicité, on a tendance à l’oublier et à tenter de forcer un peu pour faire rentrer ces cultures malgré tout dans une grille chronologique. Or ça ne marche pas comme cela et la chronologie que j’ai donné ci-dessus pour les périodes du paléolithique supérieur ne fonctionne que pour l’Europe Occidentale. Ailleurs, en Europe Centrale, en Asie, en Afrique, on a d’autres faciès, d’autres cultures et une autre périodisation, à laquelle je ne connais rien. Donc je renvoie courageusement à la page Wikipédia en anglais qui liste ces cultures en espérant qu’elle est digne de confiance : ici

L’établissement de cette chronologie ne se passe pas sans heurts:

  1. Edouard Piette (un type quand même important dans l'histoire de la Préhistoire), semble n’avoir pas une grande estime pour Gabriel de Mortillet (un autre mec important dans l'histoire de la Préhistoire) et il continue à utiliser la classification de Lartet basée sur la mégafaune, quitte à la peaufiner encore pour l’âge du Renne, en utilisant comme marqueur chronologique les restes de mégafaune, le type de support aux objets d’arts et des noms de sites éponymes qui ne sont utilisés quasiment QUE par lui. 
    Sa chronologie est tellement compliquée et ésotérique qu'il y a des articles pour tenter de raccrocher les wagons entre eux et d'autres pour expliquer pourquoi on a laché l'affaire, c'est drôle à lire (...Quand on a que ça à f... un sens de l'humour bizarre)
  2. Et quand on parle de "Bataille de l’Aurignacien", on ne fait pas référence à quel qu’obscure autant qu’antique affrontement à coup de rognons et de sagaies mais à une âpre dispute entre préhistoriens (Henri Breuil et Adrien de Mortillet, le fils de Gabriel) sur la question d’où se place l’Aurignacien dans une ligne du temps de la préhistoire (quoique les préhistoriens peuvent aussi se foutre sur la gueule à coup de rognon. Je suis sure que ça a du arriver, après tout, ils ont le matériel sous la main. Moi j'ai bien eu la tentation de... IL NE S'EST RIEN PASSÉ).

Dater les productions artistiques de la préhistoire

Revenons à nos mammouths laineux : on a établi des chronologies relatives basée sur l’outillage retrouvé en fouille stratigraphique, on tombe progressivement plus ou moins d’accord pour définir différents faciès / cultures / périodes et la façon dont ceux-ci succèdent les uns aux autres… qu’en est-il de la datation de l’art ?

Tout d’abord il faut signaler que l’idée que les gens de la Préhistoire aient produit de l’art n’allait pas de soi pour les Préhistoriens, pour des raisons conceptuelles qui sont un peu longues à dérouler ici.
La pilule fut avalée en plusieurs étapes : d’abord on a reconnu l’existence et l’authenticité d’un art décoratif sur petits objets (ce qu’on appelle l’Art Mobilier) parce que celui-ci était retrouvé lors des fouilles, en contexte archéologique. La Préhistoire (en tant que science) nait en 1859, en 1863 une défense de mammouth décorée d’une gravure de mammouth est découverte par Edouard Lartet et Henry Christy à la Madeleine : c’est officiel, l’art Mobilier existe.

En revanche, l’authenticité de l’Art Pariétal préhistorique ne sera pas reconnue avant le début du 20 siècle. Les dessins géométriques et les Toros de la grotte d’Altamira, dans laquelle on fouillait, avaient été découverts puis publiés en 1876-1880, mais ces œuvres, trop belles pour ne pas être douteuses, ont été considérées comme des œuvres du Moyen-Age ou des falsifications destinées à tourner en ridicule les Préhistoriens. …Qui ont fait un bon gros mea-culpa des familles lorsque d’autres grottes ornées sont découvertes en 1901 et qu’il devenait évident qu’il ne s’agissait pas de fraudes mais d’authentiques dessins préhistoriques. Problème : comment les dater puisqu’elles ne sont pas retrouvée (ou alors très rarement) au milieu d’une coupe stratigraphique ?

Quand des œuvres d’art mobilier sont découvertes, elles sont donc en relation avec un outillage typique et sont datées de la même période que cet outillage. Dans l’Art pendant l’Age du Renne, publié en 1907, Edouard Piette recense toutes les œuvres d’art mobilier connues. Il fait remarquer que bien souvent, les fouilleurs qui ont découvert ces pièces étaient trop éblouis par la chasse à la Belle Pièce pour noter précisément le contexte archéologique de celles-ci mais cela ne l’arrête pas et il tente de proposer une chronologie de la préhistoire basée sur le découpage en Age des Bestioles proposé par Lartet et affiné par ses soins, en posant que l’art évolue de la sculpture à la gravure sur différents matériaux, en fonction des animaux chassés. Son découpage chronologique est aussi complexe que singulier, il ne sera utilisé par personne d’autre mais il faut saluer l’essai (et puis l’ouvrage a de somptueuses reproductions en couleurs)

Au fil du temps se constitue une collection d’œuvres d’art mobilier datés avec plus ou moins de sérieux et d’exactitudes, et une fois admis l’authenticité de l’art pariétal, différents chercheurs vont tenter de dater les peintures et gravures en observant que certaines peintures en recouvrent d’autres et donc sont plus récentes, en établissant des rapprochements stylistiques entre les images pariétales ou avec celles-ci et des œuvres d’art mobilier, ce qui conduit à l’établissement de théorie sur la signification des images, les fonctions remplies par l’art préhistorique et l’évolution artistique.

Pour Henri Breuil (dit l’Abbé Breuil), il y a deux cycles artistiques :

  • Aurignacio-périgordien (Le Périgordien, ancien nom qui n’est plus utilisé désormais, correspond au Châtelperronien pour la phase ancienne et au Gravettien pour la phase récente)
  • Solutréo-Magdalénien.

Pour André Leroi-Gourhan, il y a quatre styles artistiques différents, allant du plus schématique et gauche au plus réaliste ou au contraire totalement abstrait : 

  • Style 1 : Aurignacien-Gravettien,
  • Style 2 : Gravetien-Solutréen,
  • Style 3 Magdalénien ancien,
  • Style 4 Magdalénien récent.

Ce schéma va faire autorité longtemps, même lorsqu’on en critique timidement les fondements 

Les techniques de datation absolues qui se développent dans la seconde moitié du 20eme siècle et se perfectionnent de plus en plus permettent de dater les œuvres directement et d’obtenir des dates qui contredisent parfois sérieusement celles proposées par analyse stylistique.
Mais en plus, de nouvelles découvertes ainsi que leur datation, vont aussi remettre en question le fondement théorique du système de Leroi-Gourhan : la grotte Chauvet, découverte en 1994, est décorées de peintures / dessin au fusain d’une grande beauté et très riches en détail. Elles n’ont absolument rien de la gaucherie caractéristique des œuvres les plus anciennes selon Leroi-Gourhan. Et pourtant… Elles ont été abondamment datées par C14, ce sont les peintures les plus anciennes découvertes en Europe.

Cas pratique : Lascaux

La grotte de Lascaux est découverte en 1940, techniquement par un chien qui coursait un lapin, et les quatre gamins qui cherchaient à récupérer leur chien et qui explorent le trou découvert en cherchant le chien pour découvrir dedans des peintures splendides, et de fil en aiguille Henri Breuil fini par être mis au courant de la découverte et vient examiner la grotte en septembre 1940. Comme c'est la guerre et donc une période compliquée, l'étude approfondie de la grotte devra attendre la décenie suivante. La grotte n'est plus ouverte au public, différentes répliques ont été réalisées et une visite virtuelle permet de la visiter depuis son fauteuil

Pour Breuil, les peintures de Lascaux sont similaires aux figures peintes des blocs de l’abris de Labattut (trouvés en contexte archéologiques et Aurignacien) et de l’abri Blanchard (Périgordien) et il date donc Lascaux du premier cycle, le plus ancien, Aurignacio-Périgordien.

Annette Laming nuance en estimant que l’art de Lascaux présente autant de traits Aurignacio-Perigordien que Solutréo-Magdalénien et Severine Blanc que c’est même plus proche du style Solutréo-Magdalénien.

Leroi-Gourhan compare les peintures de Lascaux à d’autres sites plus récemment découverts (Fourneau du Diable, Roc-de-Sers (Charente) et estime d’abord que Lascaux est Solutréen (style 2), avant d’estimer que c’est plutôt du Magdalénien Récent (Style 3 et 4)

En 1951, on fait une datation sur des charbons de bois découvert dans le Puit (là où se trouve le monsieur et le bison)et la date obtenue est de 15 500 ans BP (donc 13 500 ans avant notre ère à peu près), ce qui correspond à la période magdalénienne.

D’autre charbons de bois du Passage et du Puit vont donner des dates plus anciennes : 17 200 BP et 16 000 BP. (toujours dans le Magdalénien).

En 1998 et 2002, nouvelles datations C14 sur des baguettes en bois de renne : 18 600 et 18 900 BP (limite Solutréen et Magdalénien)

En 2018 et 2020, datation sur des restes de rennes trouvés un peu partout dans la grotte : 21 000 BP : on est entre le proto-magdalénien et le magdalénien.

Bref, au fil des analyses, Lascaux a voyagé quasiment dans toutes les périodes du paléolithique, du plus ancien au plus récent, les datations absolues obtenues n’ont pas été faites directement sur les peintures (parce que le noir à Lascaux, c’est pas du charbon de bois) et datent le site dans une fourchette de 5000 ans, plutôt vers la fin du Paléolithique. Et pourquoi la première date obtenue est-elle si récente par rapport aux autres ? Serait-ce que la date n’était pas calibrée ? C'est quoi calibrer une date au juste ?

…Et au final, on s’en tape mais d’une force !!!
Pardon ! Au final, c’est très intéressant si on s’intéresse au détail, mais dans des articles généralistes et synthétiques, c’est juste apporter foultitude de détails qui, au pire, sont inexacts en l’état actuel des recherches et donc vont induire le lecteur en erreur, enfin ça c’est en considérant que les lecteurs ne sont pas comme moi et retiennent réellement les dates !

Histoire d’aléger un peu le pavé (césar), je n’ai pas détaillé les différentes méthodes de datation absolue. Ce sera pour d’autres articles qui suivront bientôt, je parlerais de la calibration du C14, je vous laisse digérer celui-ci en attendant. 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité