la fin des haricots ?
Voila un mois le chat se livrait à l'habituelle démonstration de possession démoniaque sur la table d'examen de la vétérinaire. Coups de rein, bons de carpe, coups de dent... Pour l'examiner, faut des cale-mâchoires en plastique, des gants de maille et une injection d'antibiotiques sous la main, au cas-où. (Pas pour le chat, les antibio.) Le tout aux sons de hurlements à épouvanter un exorciste chevronné. D'après la qualité du spectacle, le chat tenait la grande forme, quoi. A ceci près que le chat ne mangeait plus. Or un chat, c'est gourmand. Un chat, ça n'en a rien à cogner de sa ligne. Un chat ne fait pas d'anorexie mentale. Un chat n'est pas un adepte de la non-violence et ne fait pas de grève de la faim. Sauf le mien apparemment. Donc inquiétude. Donc véto.
Une analyse de sang plus tard, on apprenait combien peuvent être trompeuses les apparences. Le chat est malade. Très très malade. Tellement malade que la vétérinaire n'osait se prononcer sur le temps qu'il lui resterait à vivre ; il était tout bonnement incroyable que le chat, ce petit monstre de treize ans, ne soit déjà mort. Les cafards résisteront à l'hiver nucléaire, mon chat continue de vivre avec un taux d'urée et de créatinine dans le sang plus de dix fois supérieur à la norme communément admise. C'est à dire avec des reins qui sont partis en grève au finish. Foutus.
Mais, contrebalançant le pessimisme des analyses, il y avait la vitalité de la bestiole. Très occupée à tenter de sauter aux murs pour se carapater... Décision fut prise de tenter le tout pour le tout et de faire comme s'il pouvait être guéri... Perfusion, hospitalisation, pilules... le chat a retrouvé l'appétit et même 700 grammes. Parallèlement, son haleine est devenue tout simplement immonde. Lorsqu'il baille, c'est comme de prendre le thé à coté des sept portes de l'Enfer. De quoi vous faire aimer l'haleine normale d'un chat, et Dieu sait qu'ils refoulent du bec, ces bestiaux.
Voila un mois donc (en fait j'arrondis un peu. Ca fera un mois le premier aout) que le manque d'appétit du chat s'étant transformé en un jeûne total nous amenait à le conduire chez le vétérinaire. Qu'on apprenait que d'après ses analyses, il était pas censé être vivant. Qu'il est encore vivant malgré tout...
Mais aujourd'hui, cela fait trois jours qu'il n'a plus mangé Il a tant maigrit que ses flancs sont creux. Que ses cuisses sont creuses. Qu'au bas de son dos, de part et d'autre des vertèbres, deux petites bosses signalent le bassin. Que chaque cote et chaque vertèbre se devinent sous les doigts de qui le caresse. Qu'il semble parfois être pris de confusion et qu'il se comporte de façon étrange, anormale. Que ses forces le trahissent de temps en temps, que ses pattes semblent vouloir se dérober sous lui tandis qu'il déambulent sur une balustrade (évidement... S'effondrer sur le plancher, c'est tellement moins stressant pour le spectateur que manquer tomber du premier étage...) En fait, excepté les vomissements et les infections cutanées, il a tout les symptômes de l'insuffisance rénale bien avancée. Trop bien avancée.
Petit chat... Vieux chaton... Petit gouteux... Puisse-tu seulement ne pas souffrir. Et encore venir ronronner de nombreuses nuits sur mes pieds. Tout le temps que nous vivons encore ensemble, je le prends en bonus. (Et si ça se trouve, demain je passe sous un tram ou le plafond du grenier fini par céder sous le poids de cent ans de vieux meubles qui s'y accumulent et me tue dans mon sommeil...)